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2024 a franchi le seuil des +1,5°C de réchauffement pour la première fois

jeudi 16 janvier 2025

Pour la première fois, l'année 2024 a franchi le seuil des +1,5°C de réchauffement depuis l'ère pré-industrielle, et ce malgré la fin de l'épisode d'El Niño. Assiste-t-on à un emballement ?

 

La première année à franchir les +1,5°C

Pour la première fois durant l'ère moderne, le réchauffement climatique - comparativement à l'ère pré-industrielle (1850-1900) - a franchi le seuil symbolique des +1,5°C à échelle planétaire. 2024 est devenue la première année à franchir ce seuil avec une anomalie de +1,6°C sur Terre. Nous semblions déjà en sursis car 2023 était passée tout près avec une anomalie frôlant les +1,5°C.

Écart à la normale de la température mondiale par rapport à l'ère pré-industrielle (1850-1900) - BBC

 

 

Ce seuil de +1,5°C est hautement symbolique. En 2015, à la suite de la COP21, un accord avait été signé par près de 200 pays pour une réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 (par rapport à 1990) et une limitation du réchauffement climatique à +1.5°C. Avec ce premier franchissement du seuil dès 2024, l'objectif semble inatteignable car le taux de CO2 sur Terre continue d'augmenter et il semble plus que probable que d'autres années suivront les pas de 2024...

Signature de l'Accord de Paris en 2015 à la suite de la Conférence sur les Changements Climatiques COP21 - AFP

 

 

La fin d'El Niño n'a pas calmé le thermomètre

L'année 2023 avait été marquée par un épisode d'El Niño important. Ce phénomène est souvent associé à une augmentation de la température mondiale. Il avait contribué à faire de 2023 l'année la plus chaude sur Terre avec une anomalie très proche de +1,5°C. El Niño s'est achevé dès début 2024 et la suite de l'année fut neutre. On pouvait alors s'attendre à un léger recul de la température mondiale. Or, il n'en a rien été et 2024 a surpassé 2023.

Phases d'El Niño et de La Niña de 2013 à 2025 - NOAA

 

 

2024 a nettement dépassé 2023 avec une anomalie de +1,6°C à échelle mondiale, comme évoqué plus haut. Dans les faits, l'anomalie n'a pas du tout reculé au fil des mois de l'année, et ce malgré la fin d'El Niño. Comme le montre le graphique ci-dessous, c'est même lors de l'automne que le température mondiale fut la plus élevée, dépassant de loin les années précédentes. La fin d'El Niño n'aura donc pas calmé la température mondiale comme on aurait pu l'espérer...

Anomalie thermique mensuelle en 2024 et depuis 1900 - graphique NASA

 

 

Un emballement pour plusieurs causes

Chute des rejets d'oxydes de soufre

Au 1er janvier 2020, de nouvelles réglementations sont entrées en vigueur, visant à réduire drastiquement la pollution au soufre causée par le trafic maritime. La baisse des émissions fut brutale sur tous les bassins du monde. Les rejets d'oxydes de soufre ont chuté de plus de 80% ! Une bonne nouvelle pour l'environnement et la qualité de l'air. Sauf qu'il pourrait y avoir un revers de médaille. En effet, les oxydes de soufre agissent comme des aérosols réfléchissant une partie de la lumière du soleil. Avec 80% de soufre en moins dans l'atmosphère, il y a donc plus d'énergie solaire atteignant les basses couches de l'atmosphère, pouvant induire un réchauffement.

 

Total des émissions des oxydes de soufre (SOx) selon les différents bassins - via EEA

 

 

Le GIEC considère qu’il y a des preuves solides indiquant un effet des aérosols sur le forçage radiatif ; autrement dit un effet refroidissant des oxydes de soufre dans l'atmosphère. D'ailleurs, de récentes études ont mis en évidence que la part de radiation solaire absorbée a considérablement augmenté depuis 2020 dans le nord de l'Atlantique et le nord du Pacifique, ce qui coïncide avec les zones où le trafic maritime est le plus fort et où - logiquement - les rejets de soufre étaient les plus importants. Dans les eaux de l'hémisphère sud, où le trafic maritime est moins dense, cette augmentation d'absorption de la radiation solaire est beaucoup plus négligeable.

Augmentation de l'absorption de la radiation solaire des océans et zones des rejets d'oxydes de soufre - via Nature

 

 

Emballement du réchauffement en Arctique

Par ailleurs, le réchauffement global est tiré vers le haut par l'Arctique, dont le réchauffement est 4 fois plus rapide que dans le reste du monde ! La donne s'est particulièrement accentuée depuis une décennie. En Arctique, les 9 années les plus chaudes sont les 9 dernières. En Sibérie, certains secteurs voient la température moyenne augmenter de 1,5°C chaque décennie, des chiffres astronomiques et qui laissent craindre un emballement, entre fonte du permafrost et incendies toujours plus nombreux...

Évolution de la température et de la concentration en glace par décade en Arctique - via Nature

 

 

Il y a peu, la NOAA (Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique) a publié un rapport inquiétant indiquant que le Pôle Nord est désormais émetteur de CO2. Plus concrètement, de très nombreuses zones (en violet) sont désormais émettrices de CO2 et les zones qui le stockent (en vert) ne parviennent désormais plus à compenser les émissions. La fonte du permafrost, ces sols en permanence gelés et qui renferment d'importantes quantités de gaz à effet de serre, en est l'une des principales raisons.

Zones absorbant (en vert) et émettant (en violet) du CO2 en Arctique - NOAA

 

Même si nous avons fait de grands progrès dans la compréhension du climat, il demeure encore de nombreuses inconnues que l'homme ne maitrise pas. Ainsi, il est important de faire preuve d'humilité face à nos prédictions du climat futur, bien que tous les voyants soient indéniablement au rouge... 

 

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