À quoi ressemblait le dernier âge glaciaire et cela peut-il se reproduire ?
mercredi 31 août 2022
Après avoir parlé de chaleur caniculaire et de sécheresse tout au long de l'été, Météo Villes vous propose de vous replonger dans le dernier âge glaciaire que la Terre ait connu. Un refroidissement global et durable pourrait-il se reproduire ?
Il y a 11.700 ans : le dernier âge glaciaire
Grâce à la paléoclimatologie, l'homme a su reconstituer de manière fiable le climat sur Terre des dernières centaines de milliers d'années. Ainsi, les chercheurs ont constaté que notre planète subit un cycle d'alternance entre de longues périodes glaciaires et de plus courtes périodes de net réchauffement (ou inter-glaciaires). Nous sommes d'ailleurs au cours de l'une d'elles. La dernière glaciation a débuté il y a 115.000 ans et s'est achevée il y a 11.700 ans, une éternité à échelle humaine mais une bien faible période à l'échelle de notre planète âgée de 4,5 milliards d'années.
Évolution des températures sur Terre depuis l'an -400.000 - via agoradessciences.com
ll est majoritairement admis que ce sont les modifications de l'orbite de la Terre qui génèrent les différents cycles de glaciation et de réchauffement (cycles de Milankovitch). S'en suit un cercle vicieux avec une augmentation ou une diminution nette du CO2, puissant gaz à effet de serre, avec un réchauffement ou un refroidissement du climat mondial. Plus concrètement, on observe sur la gauche du graphique ci-dessous que les températures étaient 9°C en dessous des valeurs actuelles à l'apogée du dernier âge glaciaire, il environ 21.000 ans. Autant dire que le climat n'était absolument pas le même.
Évolution des taux de CO2 et de la température sur Terre de -450.000 ans à nos jours - via Energy Matters
Lors des périodes de glaciation, c'est l'hémisphère nord de la planète qui se refroidit le plus nettement. L'explication est simple : la partie nord du globe terrestre comporte bien plus de terres que sa partie sud. Or, le froid s'accumule et s'accentue bien plus facilement au dessus des continents qu'au dessus des océans. Ainsi, lors de l'apogée du dernier âge glaciaire (il y a 21.000 ans), la glace recouvrait toute la partie nord de l'Europe ainsi que tout le Canada et le nord des États-Unis. Une partie de l'Amérique du Sud était également prise dans la glace.
Étendues des glaces sur Terre il y a 21.000 ans à l'apogée du dernier âge glaciaire - via kerbtier.de
Si l'on se focalise sur l'Europe, on constate que toute sa partie nord était couverte par les glaces il y a 21.000 ans. Une grande partie du Royaume-Uni, l'intégralité de la Scandinavie, toutes les régions bordant la Mer Baltique et même le nord-est de l'Allemagne étaient de vastes étendues glacées. En France, les glaciers alpins étaient infiniment plus étendus qu'aujourd'hui et toutes les vallées jusqu'à Grenoble étaient recouvertes par la glace !
Étendues des glaces en Europe il y a 21.000 ans à l'apogée du dernier âge glaciaire - via Wikipedia
N'oublions pas que l'homme est apparu sur Terre il y a plusieurs millions d'années (il y a environ 2,7 millions pour l'Homo habilis et 1,8 million pour l'Homo erectus). Il a donc survécu à plusieurs cycles de glaciation. Lors du dernier âge glaciaire, c'est l'homme de Néandertal qui a du s'adapter, migrant dans des cavernes et utilisant le feu pour se protéger des froids les plus mordants. Comme la nature est bien faite, nos ancêtres ont également développé un système pileux plus important lors des périodes les plus froides.
L'homme de Néandertal a survécu à plusieurs âges glaciaires - via pourlascience.fr
Minimum médiéval : un faux âge glaciaire
On parle souvent du minimum médiéval comme d'un "petit âge glaciaire". En effet, les températures mondiales ont baissé au cours du Moyen-Âge, dès le début des années 1300. Le véritable réchauffement ne sera observé qu'au milieu du XIXème siècle. Cependant, cette période de l'histoire récente n'a absolument rien à voir avec une glaciation. On remarque sur le graphique ci-dessous que les températures n'ont baissé que d'environ 1°C dans le monde, très loin des 7 à 9°C de baisse causés par les véritables âges glaciaires !
Courbe des températures entre la fin de la dernière glaciation et aujourd'hui - via Dans l’ère du temps
Des études ont remarqué des dépôts très importants de sulfates et de microparticules de verre dans des carottes de glaces issues des pôles. Ils se seraient formés en 1258 ou 1259 et seraient liés à une importante éruption volcanique. La cause sera l'éruption volcanique de 1257 sur l'île de Lombok en Indonésie. Elle aurait rejeté de nombreuses particules dans la stratosphère, réfléchissant une plus grande partie du rayonnement solaire vers l'espace, ce qui a contribué à un refroidissement progressif. D'autres éruptions massives auraient entretenu le phénomène les décennies suivantes, même s'il reste quelques zones d'ombre sur les causes exactes de ce refroidissement durable.
Le "petit âge glaciaire" a rendu la vie très difficile durant le Moyen-Âge - P.Bruegel
Un nouvel âge glaciaire peut-il se produire ?
Les climatosceptiques avancent souvent l'argument comme quoi le réchauffement climatique actuel n'est qu'un cycle naturel. Il ne faut pas se tromper d'échelle ! Les cycles de réchauffement du passé s'étalaient sur des milliers d'années, avec une augmentation très lente des taux de CO2 dans l'atmosphère terrestre. Avec l'activité humaine, le taux de CO2 a explosé en un temps record, augmentant de 50% en moins de 200 ans ! De nos jours, on atteint plus de 418 ppm de CO2 dans l'air, alors que le record datant d'il y a plus de 300.000 ans était de 300 ppm. Et les taux continuent de grimper en flèche à des vitesses inédites ! Le rôle de l'homme est indéniable.
Taux de CO2 sur Terre de l'an -800.000 à aujourd'hui - via NASA / NOAA
Il suffit de regarder l'évolution des températures mondiales depuis le début du millénaire pour se rendre compte de l'emballement depuis le début de la révolution industrielle. Alors que les augmentations et diminutions de températures s'opéraient de façon lente et sur des milliers d'années, la courbe s'envole en quelques décennies seulement ! Et puisqu'il y a toujours plus de CO2 dans l'air, l'augmentation des températures mondiales n'est pas près de s'arrêter...
Évolution de la température mondiale de l'an 0 à aujourd'hui - via Ed Hawkins
Si l'on s'en réfère aux cycles de Milankovitch évoqués au début de cet article, les prochaines périodes favorables à une glaciation auront lieu d'ici 40.000 à 60.000 ans. Mais plusieurs études indiquent que les taux historiques de CO2 dans l'atmosphère pourraient retarder la future glaciation (certaines études avancent 100.000 ans). Les périodes inter-glaciaires (comme l'actuelle) sont toujours suivies de glaciations. Mais que restera-t-il de l'homme dans plusieurs dizaines de milliers d'années ?
Projection de la hausse de la température mondiale d'ici 2100 - via AFP
Alors que les scénarios les plus pessimistes envisagent une augmentation de 7°C des températures d'ici 2100, il ne faut pas compter sur une nouvelle glaciation pour résoudre nos problèmes de réchauffement climatique. Il n'est pas certain que l'homme soit encore là lors de la prochaine. De plus, il reste de nombreuses inconnues : d'ici quelques siècles l'homme manquera de pétrole, gaz ou charbon. Qu'adviendra-t-il de nos émissions de CO2 ? Comment la Terre va-t-elle en absorber l'excès ? Dans tous les cas, chacun d'entre-nous subit les effets du changement climatique actuel alors que notre génération ne sera plus là depuis de nombreux millénaires lors de la prochaine ère glaciaire.