Mer anormalement chaude en Méditerranée : multiples conséquences néfastes
lundi 25 juillet 2022Anomalie de la température de la Méditerranée en surface au vendredi 22 juillet 2022 - via Copernicus
Conséquence directe de la persistance de conditions anticycloniques, généreusement ensoleillées et excessivement chaudes, la température de l'eau de mer atteint des niveaux très élevés et entraîne des conséquences néfastes.
Une eau de mer anormalement chaude
En date du lundi 25 juillet 2022, la température de l'eau atteint parfois les 20°C en Mer du Nord, dans la baie du Havre et celle du Mont-Saint-Michel. L'océan grimpe autour de 23°C sur les plages basques. C'est toutefois en Méditerranée que l'eau de mer est la plus chaude avec des températures assez surprenantes, de l'ordre de 25 à 26°C sur les plages du golfe du Lion, 27 à 28°C sur le rivage de la côte d'Azur et de 28 à 29°C sur les plages corses (très localement 30°C) !
Température de l'eau de mer en surface au lundi 25 juillet 2022 - via ECMWF
Si l'on se penche sur les anomalies de température de l'eau, on constate que l'excédent à la normale atteint +3 à +4°C sur l'est de la Manche et la Mer du Nord ainsi qu'entre le Roussillon et l'Hérault. Cette anomalie devient vraiment remarquable de la côte d'Azur à la Corse où les eaux sont généralement 5 à 6°C plus chaudes que la normale !
Anomalie de la température de l'eau de mer en surface au lundi 25 juillet 2022 - via ECMWF
Cette anomalie est loin de ne concerner que les côtes françaises. En raison d'un printemps et d'une première partie d'été largement dominés par l'anticyclone et les masses d'air surchauffées, l'ensemble du bassin méditerranéen affiche des températures anormalement chaudes. En surface, l'anomalie est souvent comprise entre +4 et +6°C sur de très vastes étendues : la Méditerranée surchauffe en cet été 2022 !
Anomalie de la température de la Méditerranée en surface au vendredi 22 juillet 2022 - via Copernicus
Surchauffe maritime aux conséquences néfastes
Les coraux en souffrance
La mauvaise santé des coraux est l'une des conséquences les plus connues de l'augmentation de la température de l'eau de mer. En effet, ces espèces marines qui ne se développent que très lentement sont incapables de s'adapter à des changements climatiques trop brutaux. En l'occurrence, l'augmentation de la température de l'eau conduit à un phénomène de blanchiment des coraux. Si ce phénomène perdure durant plusieurs semaines et que la température de l'eau ne baisse pas, le corail meurt.
Le blanchiment des coraux est causé par l'augmentation de la température de l'eau - via Mr Mondialisation
Les récifs coraliens ne recouvrent qu'environ 0,1% du fond des mers & océans mais abritent à eux seuls environ 25% de la biodiversité marine, d'où une importance capitale ! On l'ignore souvent mais le corail est présent dans les eaux de France métropolitaine, au large de la Bretagne (corail d'eaux froides) comme en Méditerranée (plusieurs espèces dont le célèbre corail rouge) même si les principaux récifs coraliens français se trouvent dans les eaux des outre-mer.
Une nouvelle algue invasive
Ces derniers mois, une nouvelle espèce d'algue a été observée dans les eaux françaises. La Lophocladia Lallemandii, plus communément appelée algue rouge, a été observée récemment dans les eaux de Port-Cros au large du Lavandou dans le Var. La présence de cette algue qui vient de l'Océan Indien et de la Mer Rouge n'a rien de rassurant car elle dégage des toxines qui fait fuir les poissons. N'étant pas consommée, cette espèce peut rapidement devenir invasive et modifier considérablement les écosystèmes par sa prolifération...
L'algue rouge s'installe en Méditerranée et a de quoi inquiéter - photo via Le Parisien
Modification de la faune marine
Si les touristes ne se plaindront sûrement pas d'une eau de mer plus chaude que la normale, les conséquences néfastes sont multiples. Les différentes espèces aquatiques n'apprécient guère les eaux trop chaudes. En effet, une eau anormalement chaude en été peut entraîner une prolifération de virus et de phytoplancton toxique, causant la mort de certaines espèces. D'ailleurs, ce phytoplancton toxique peut contaminer les fruits de mer que nous consommons, d'où des interdictions de vente de plus en plus fréquentes qui inquiètent les producteurs.
Huître morte en Bretagne du fait de l'eau de mer trop chaude en juillet 2022 - via JT TF1
Avec cette augmentation de la température moyenne des eaux méditerranéennes, les espèces endémiques s'y plaisent de moins en moins. On assiste à une modification de leur comportement et à une réduction de leur population. À l'inverse, on estime qu'environ 1.000 espèces aquatiques exotiques ont d'ores et déjà migré en Méditerranée. En d'autres termes, certaines espèces méditerranéennes disparaissent au profit d'espèces exotiques.
Crainte d'épisodes méditerranéens plus violents
En plus des différentes conséquences néfastes évoquées ci-dessus, une autre menace plane sur la saison automnale à venir : les épisodes méditerranéens pourraient s'avérer particulièrement violents ! En effet, ces derniers se forment lorsque de l'air froid en altitude (associé à une dépression) survole les eaux chaudes de la Méditerranée. Ce contraste de masses d'air favorise la formation d'orages pouvant générer des pluies diluviennes et des inondations sur le sud-est de la France.
Schéma explicatif de formation d'un épisode méditerranéen - via Météo France
Or, les eaux anormalement chaudes de la Méditerranée en cette année 2022 sont susceptibles de renforcer l'intensité de ces épisodes. En effet, plus l'eau de mer est chaude et plus l'air qui la surplombe peut se charger en humidité. Il existe donc un risque de rencontrer des épisodes méditerranéens particulièrement actifs à l'automne. Cependant, rappelons qu'il est nécessaire qu'un contexte dépressionnaire se mette en place pour déclencher un épisode méditerranéen. Si l'anticyclone reste tenace en Méditerranée durant l'automne, il ne se passera rien.