2023 ou l'arrêt des blocages anticycloniques à répétition en France
mercredi 9 août 2023
Vous l'aurez constaté, les blocages anticycloniques qui ont rythmé notre temps jusqu'à l'hiver dernier se font nettement plus discrets. Notre bon vieux flux océanique a fait un retour remarqué ces derniers mois.
Succession de blocages ces dernières années
Depuis plusieurs années, nous vous avons régulièrement parlé des longues séquences de temps calme et anticyclonique en France. En effet, ces situation de blocage ont été anormalement nombreuses avec des anomalies de hautes pressions perdurant parfois durant de longs mois, comme ce fut le cas à l'hiver 2021-2022 et au printemps 2022 (cartes ci-dessous). Ainsi, nous pouvions connaître des semestres entiers de domination anticyclonique, durant lesquels les journées instables étaient très peu nombreuses et la pluviométrie largement déficitaire.
Anomalies de géopotentiels en hiver 2021-2022 et au printemps 2022 - via climatereanalyzer.com
Ces nombreuses séquences anticycloniques ont été observées à compter de l'année 2018, même si la tendance s'est accentuée au printemps 2020 (au moment où le coronavirus est venu perturber nos vies). Ces dernières années, les taux d'ensoleillement furent assez nettement supérieurs à la normale en France. En 2019 et en 2020, l'anomalie nationale était de +12%, très prononcée sur la moitié nord où elle dépassait parfois les 20% sur l'année (+25% à Paris en 2020) ! L'excédent national fut de +6% en 2021 avant une année 2022 remarquable avec un excédent national de +16%, atteignant localement les +30% sur 12 mois dans le nord du pays !
Anomalies annuelles d'ensoleillement en France de 2019 à 2022 - Météo Villes
Ces blocages anticycloniques se produisaient parfois en plein cœur de l'été, conduisant à des canicules répétées et à des sécheresses importantes, engendrées par une succession exceptionnelle de journées de plein soleil. Les images satellite ci-dessous montrent qu'il y avait quasiment pas eu de nuage en France entre le 8 et le 19 juillet 2023, soit une douzaine de jours de plein soleil ! Une situation qui apparaît bien éloignée de celle que nous observons durant cet été 2023...
Image satellite de la France du 8 au 19 juillet 2022 - EUMETSAT via meteociel.fr
Fin des blocages à répétition depuis mars 2023
Cette récurrence de blocages anticycloniques semble s'être arrêtée au mois de mars 2023. Ce dernier avait mis fin à une longue séquence nettement trop sèche entre l'été 2021 et l'hiver 2022-2023. En mars dernier, un puissant courant océanique dépressionnaire s'était mis en place sur la France avec un cas d'école de flux zonal circulant du proche-Atlantique à la Scandinavie. Les perturbations s'étaient enchaînées en arrosant copieusement l'hexagone durant plusieurs semaines. Depuis, plus aucun blocage anticyclonique majeur et durable ne s'est reproduit.
Pression moyenne sur l'Atlantique et l'Europe au mois de mars 2023 - via Météo France
En cet été 2023, nous avons renoué avec une circulation générale nettement plus classique et bien éloigné des blocages anticycloniques caniculaires de l'été 2022. En effet, les basses pressions dominent les débats depuis le mois de juin entre l'Atlantique et l'ouest de la Russie en passant par les Îles Britanniques. Ainsi, l'air océanique nous concerne régulièrement en apportant des séquences pluvio-orageuses et en freinant la chaleur. Les hautes pressions, quant à elles, dominent largement en Méditerranée où des conditions caniculaires ont été observées ces dernières semaines, débordant parfois sur le sud-est de la France.
Anomalies de géopotentiels en juin et juillet 2023 - via climatereanalyzer.com
Un changement bien perceptible
Pour de nombreuses régions françaises, la circulation générale nettement plus classique observée depuis le mois de mars dernier a des conséquences bien visibles. L'exemple de Paris est particulièrement parlant. Si l'on se penche sur l'ensoleillement du printemps et de l'été (jusqu'en date du 8 août), on constate qu'il y a eu 303 heures de soleil en moins en 2023 qu'en 2022 sur la capitale ! Paris atteint à peine la normale en 2023, après avoir enregistré un excédent annuel de 27% l'année dernière ! Autant dire que la différence se remarque.
Ensoleillement à Paris du 1er mars au 8 août en 2022 et en 2023 - Météo Villes
Le contraste est encore plus frappant en se penchant sur la pluviométrie. Entre le 1er mars et le 8 août 2022, il n'était tombé que 189 mm de pluie sur Paris. Durant la même période en 2023, le cumul est de 381 mm - soit littéralement le double ! La perception de la météo des printemps & été 2023 est donc radicalement différente de celle des printemps & été 2022. Cependant, il est important de préciser que 2023 ne figure absolument pas parmi les années plus arrosées à Paris (pour le moment). Ce sont plutôt les printemps & été 2022 qui avaient été remarquablement secs.
Pluviométrie à Paris du 1er mars au 8 août en 2022 et en 2023 - Météo Villes
Vers un automne perturbé ?
Selon les modèles saisonniers, il n'est pas envisagé de retour des blocages anticycloniques durables d'ici à la fin de l'année 2023. D'ailleurs, la dernière réactualisation du modèle européen pour le trimestre septembre-octobre-novembre met en évidence une probabilité assez nette de pressions plus basses que la normale en France et sur le proche-Atlantique. Cet automne 2023 pourrait donc être rythmé par des séquences perturbées, sous un flux océanique possiblement dynamique.
Anomalie de pression modélisée pour l'automne 2023 - carte ECMWF
Gardons à l'esprit que les tendances saisonnières doivent être prises avec des pincettes (elles s'étaient d'ailleurs trompées sur cet été), même s'il semblerait que cette année 2023 marque le retour d'un courant océanique bien plus fréquent et donc d'une configuration bien plus typique du climat Français que celle des dernières années.