Depuis quelques jours, l'hiver a fait son apparition, avec des températures assez basses au nord de la Loire, et de fréquentes gelées parfois fortes (jusqu'à -10°C dans les Ardennes). Malgré tout, la masse d'air globale présente au dessus de nos têtes n'a rien de très hivernale : pour preuve, la température reste positive à 1500m d'altitude, que cela soit de jour, comme de nuit !

Des températures plus douces en altitude qu'en plaine ? Nous sommes dans une situation parfaite dite d' "inversion de température". En temps normal, la température décroit avec l'altitude. Bien que le profil vertical thermique (la variation de la température en fonction de l'altitude) n'est jamais véritablement linéaire, on estime qu'en moyenne, nous perdons environ 6.5°C tous les 1000m d'altitude, jusqu'à la tropopause (entre 10 et 15km d'altitude).

Or, dans notre cas, nous sommes actuellement au sein d'une période particulièrement stable : un anticyclone stationne depuis plusieurs jours sur l'Europe, éloignant toute perturbation bien loin de nos contrées. Cet anticyclone va jouer dans notre atmosphère un rôle de couvercle. Il faut ensuite savoir que l'air à un poids variant selon sa température : une masse d'air froid est plus lourde qu'une masse d'air chaud. Sous ce « couvercle », l'air froid va alors être plaqué vers le sol, surplombé en altitude par l'air plus doux. Résultat, il est très courant d'observer des températures largement négatives en hiver en plaine près du sol, et des températures supérieures à 5 voire 10°C à plus de 1000m d'altitude !

Schéma descrptif général sans inversion (haut) et avec inversion de température (bas)

Ce samedi 3 décembre, nous observions par exemple 0°C à Saint-Martin-d'Hères (banlieue de Grenoble) au petit matin. Et pourtant, la température n'est pas descendue au dessous de 5°C en station à Chamrousse, pourtant située à 1800m d'altitude. Les radiosondages permettent d'observer ces variations de température selon les couches de l'atmosphère. Ils sont réalisés deux fois par jour à partir de ballons sondes, émettant leurs données en temps réel jusqu'à parfois plus de 30km d'altitude.

Cette mesure effectuée à Bordeaux cette nuit est parfaitement représentative de cette couche d'inversion. A 1h du matin, on observait 3.4°C à 137m d'altitude. Mais alors que la température est censée diminuer, celle-ci augmente avec l'altitude pour atteindre 11° à 700m d'altitude ! Au delà de ces 700m, le couvercle généré par la présence de l'anticyclone est dépassé : nous retrouvons alors des conditions habituelles avec une baisse progressive de la température à chaque mètre perdu (10.4° à 1117m, 4,4° à 1975m, -0.8° à 3039m).

Ce couvercle est souvent visible et délimité par la présence de plaques de nuages bas, retrouvés eux aussi bloqués par l'anticyclone dans les basses couches de l'atmosphère (dans notre cas au dessus de Bordeaux, cela signifie qu'il fallait prendre 700m d'altitude pour retrouver des conditions ensoleillées). Sous ce couvercle, il est à noter que les conditions sont généralement très calmes, avec une absence prolongée de vent. Les gaz à effet de Serre émis se retrouvent également bloqués, et ne peuvent pas être dispersés dans l'atmosphère, occasionnant des pics de pollution >>.

Couche d'inversion (couvercle) ce matin depuis Chamrousse