Retour de la Niña dans les prochains mois : quelles conséquences ?
lundi 15 avril 2024Le climat de la planète est influencé par les flux atmosphériques mais également par les océans et leur température. Ces phénomènes couplés océan/atmosphère régulent en effet le climat de façon cyclique, c'est ce que l'on appelle les cycles « ENSO », qui dépendent principalement de la température des eaux de surface de l'océan Pacifique, notamment sa partie Est.
En temps normal, les eaux situées au large du Pérou sont plus froides que celles situées à l'Ouest, à cause des alizés soufflant de l'Est vers l'Ouest et ramenant les eaux plus chaudes dans cette direction. De façon cyclique, la situation s'inverse et les températures de ces eaux deviennent plus élevées qu'à l'accoutumée, comme cela a pu être observé depuis l'année dernière, avec des conséquences importantes sur le climat des régions bordant le Pacifique mais également au niveau mondial, c'est ce qu'on appelle le phénomène climatique El Niño.
Conséquences planétaires du phénomène El Niño – Via France Bleu
Ces derniers mois, c'est donc le phénomène El Niño qui a influencé le climat mondial avec notamment comme conséquence des températures records sur la quasi totalité du globe mais également au niveau des océans.
Vers la fin d'El Niño dans les prochains mois ?
Si des prémices de sa mise en place ont pu être observés dès le début de l'année 2023, El Niño a véritablement été officialisé au début du mois de juillet par l'organisation météorologique mondiale (WMO). Celui-ci s'est ensuite rapidement renforcé, atteignant une intensité modérée dès le mois de septembre puis un pic entre la fin d'année 2023 et le début d'année 2024.
Anomalies de températures des eaux de surface du Pacifique en juillet 2023 – NOAA
Celui-ci a eu des conséquences parfois notables sur le climat mondial, notamment, comme évoqué précédemment, au niveau des températures mais également au niveau des conditions météorologiques sur certaines régions. La Californie a par exemple connu une succession d'épisodes pluvieux extrêmes durant de longs mois, entraînant des inondations parfois catastrophiques, une conséquence reconnue de la mise en place du phénomène planétaire El Niño.
Conséquences d'importantes inondations en Californie en janvier 2024 – Via Twitter @DisasterTrackHQ
En général, ce phénomène climatique est temporaire, ne durant que quelques mois, jusqu'à 1 voire 2 ans pour les plus longs. Actuellement, le phénomène El Niño que nous avons connu ces derniers mois est en atténuation rapide après avoir atteint son pic entre la fin d'année 2023 et le début d'année 2024.
Les données indiquent en effet un refroidissement progressif des eaux de surface de l'Est du Pacifique, ce qui veut dire que nous allons retrouver des conditions plus neutres après un épisode El Niño relativement rapide, mais marqué.
Évolution de la température des eaux du Pacifique entre février et avril 2024 – NOAA
Les épisodes El Niño sont généralement suivis d'épisodes La Niña de façon cyclique, en moyenne tous les 3 à 7 ans. Cependant, on a observé ces dernières décennies que les périodes de transitions (conditions neutres) entre ces deux phénomènes étaient de plus en plus rapides et intenses, une conséquence possible du réchauffement climatique qui reste encore à être approfondie.
Vers le retour rapide de la Niña ?
Cette année ne devrait pas déroger à la règle. Les conditions « normales » attendues durant le printemps pourraient rapidement laisser place au retour de La Niña d'après les dernières prévisions des organismes spécialisés.
Evolution de la probabilité de mise en place de la Niña dans les prochains mois – NOAA
D'après la NOAA, La Niña pourrait donc rapidement se mettre en place dans les prochains mois, l'organisme envisageant une probabilité de 80% que ce phénomène climatique se développe dès cet été. Les eaux de l'Est du Pacifique se refroidissent en effet rapidement, ce qui diminue les chances qu'une période neutre durable se mette en place.
D'après certains scénarios, l'anomalie de température pourrait atteindre -1 à -1,5°C sur les eaux de surface du Pacifique d'ici l'automne, ce qui équivaudrait à la mise en place d'un épisode de La Niña modéré.
Quelles conséquences sur le climat mondial ?
Lors d'un épisode "La Niña", les courants marins sont modifiés et la donne climatique est bouleversée en plusieurs lieux du Globe. Par exemple, il est possible d'observer :
- Un temps plus chaud et sec que la normale dans le Sud des États-Unis.
- Des températures plus froides sur le Nord-Ouest du continent nord-Américain (Alaska, une partie du Canada) ainsi que sur une partie du Brésil.
- Une zone fraîche et sèche en Afrique centrale et orientale ainsi que sur les îles intertropicales du Pacifique.
- Des précipitations fréquentes dans la partie sud de l'Afrique, en Amérique Centrale, en Asie du Sud, ou encore le Nord et l'Ouest de l'Australie.
Conséquences de La Niña à travers le monde – Via Ocean Wiki
Ce type d'épisode a également pour conséquence d'engendrer une légère baisse des températures moyennes mondiales, tant au niveau de l'atmosphère que des océans, une bonne nouvelle après de nombreux mois records à ce niveau. Toutefois, La Niña est un phénomène climatique moins marqué qu'El Niño, ce qui pourrait dire que le rafraîchissement attendu pourrait rester relativement limité.
L'une des conséquences les plus notables est néanmoins observée sur l'activité cyclonique dans le bassin Atlantique Nord, qui est en général bien plus active durant les périodes de La Niña en raison de conditions atmosphériques plus favorables à leur formation et leur renforcement.
Impacts de La Niña sur l'activité cyclonique en Atlantique Nord – NOAA
Or, d'après les prévisions, ce phénomène climatique devrait nettement se renforcer au moment de la haute saison des cyclones sur ce bassin, ce qui pourrait apporter bien plus de phénomène tropicaux que la normale, notamment si l'on considère les températures océaniques anormalement élevées sur cette région du monde ces derniers mois, qui offrent un carburant supplémentaire au renforcement des ouragans.
C'est en tout cas ce qu'envisagent les prévisions des organismes spécialisés avec une saison 2024 envisagée bien plus active que la moyenne sur ce bassin.
Prévisions de l'activité cyclonique 2024 sur le bassin Atlantique – Colorado State University
En Europe, les conséquences d'un phénomène La Niña sont beaucoup plus délicates voire impossibles à déterminer du côté de l'Europe. En effet, aucune modification globale du temps n'a réellement été constatée jusqu'alors sur le vieux continent depuis le début de l'analyse du phénomène au milieu du XXe siècle.