Ruissellements et inondations éclair à Paris, Toulouse et Lyon : les explications
lundi 12 juin 2023
Ces derniers jours, des orages diluviens ont engendré ruissellements et inondations éclair dans plusieurs grandes villes de France. Comment expliquer ce phénomène ?
Orage diluvien : l'intensité plus que le cumul
Lorsque l'on évoque les inondations-éclair générées par les orages, on a tendance à se référer au cumul de précipitations qui s'est abattu sur la zone. Pourtant, les cumuls observés ne sont pas toujours exceptionnels, contrairement à l'intensité. En effet, un cumul de 20 mm n'aura pas du tout les mêmes conséquences qu'il tombe en 2 heures ou en 15 minutes. C'est donc l'intensité des pluies qui est le facteur clé dans la survenue des ruissellements et des inondations sous orages. La carte ci-dessous est intéressante car elles montre qu'il est tombé jusqu'à 21 mm à Lariboisière dans le nord de Paris et 27 mm au Bourget (93) lors des orages de la soirée du dimanche 12 juin 2023, des cumuls qui n'ont rien d'exceptionnel.
Cumuls de précipitations en Île-de-France le dimanche 11 juin 2023 - via meteociel.fr
Si les stations n'ont généralement pas enregistré plus de 20 à 30 mm dans les zones les plus touchées par l'orage du 11 juin au soir, ce sont bel et bien les intensités qui ont conduit à des ruissellements et des inondations. Dans le nord-est de Paris (zone la plus touchée de la capitale), ces 20 à 30 mm sont tombés en l'espace d'un quart d'heure seulement ! Au plus fort de l'orage, les echos radar ont temporairement mesuré des intensités de 150 à 250 mm/h ! Cela représente de grandes quantités d'eau s'abattant en seulement quelques minutes...
Intensités pluviométriques en région parisienne le dimanche 11 juin 2023 à 21h - via meteociel.fr
Les sols urbains favorisent les ruissellements
Lorsque survient un orage diluvien, la nature des sols joue également un rôle clé dans la survenue (ou non) d'inondations. Les grandes villes comme Paris - dont les sols sont très bétonnés - sont évidemment plus exposées au risque d'inondations-éclair car l'eau de pluie ne peut pas pénétrer dans le sol et n'a pas d'autre choix que de ruisseler. De plus, le réseau d'assainissement de Paris ou d'autres grandes villes n'est pas adapté à des pluies d'une telle intensité car celles-ci sont rares et augmenter les capacités du réseau serait très coûteux (et inutile 99,9% du temps). On peut également ajouter que des problèmes d'entretien du réseau peuvent parfois accentuer les inondations urbaines (évacuations obstruées, etc)...
Inondations dans le nord de Paris en soirée du dimanche 11 juin 2023 - captures Twitter via Le Parisien
Outre les réseaux d'assainissement pas toujours adaptés aux précipitations diluviennes, il faut ajouter que la topographie des lieux joue également un rôle clé. En soirée du dimanche 11 juin 2023, le plus gros de l'orage a frappé le nord-est de Paris. Le quartier Jourdain/Belleville est celui qui a subi le plus d'inondations. S'il fut le secteur le plus touché par les pluies intenses, il faut également ajouter que ce quartier est assez vallonné avec quelques rues pentues. Cela favorise grandement les ruissellements et notamment les accumulations d'eau en bas de ces rues, où surviennent généralement les inondations.
Ruissellements dans le nord-est de Paris en soirée du dimanche 11 juin 2023 - via Christophil Thevenin Cottin
Caractère stationnaire : un facteur aggravant
Ce dimanche 11 juin 2023, la ville de Toulouse a également subi un orage diluvien. Contrairement à celui de Paris, ce dernier a pris un caractère stationnaire en déversant de fortes pluies sur la ville rose et son agglomération durant une heure. Dans ce cas de figure, le cumul total de pluie vient s'ajouter aux intensités pluviométriques, constituant un facteur aggravant. Plusieurs dizaines de millimètres de précipitations peuvent tomber en l'espace d'une heure. Rapidement, le réseau d'assainissement sature et l'eau s'accumule dans les rues.
Inondations dans les rues de Toulouse en soirée du dimanche 11 juin 2023 - via Guillaume Pannetier
C'est le même type d'orage diluvien et stationnaire qui avait touché Lyon et une partie de son agglomération le samedi 3 juin dernier. L'orage avait fait du sur-place durant 1h30 et déversé des quantités d'eau atteignant 50 à 80 mm ! Logiquement, le réseau d'assainissement était arrivé à saturation et de nombreux secteurs avaient été inondés. Sur les images ci-dessous, on observe bien le trop-plein d'eau au niveau des bouches d'égoût qui recrachent une partie de l'eau de pluie.
Inondations sous l'orage diluvien près de Lyon en soirée du samedi 3 juin 2023 - via Javier Villagarcía
La sécheresse n'arrange rien
Enfin, il faut ajouter que la sécheresse superficielle des sols - qui s'est considérablement accentuée depuis la mi-mai sur la moitié nord de la France - augmente la vulnérabilité aux ruissellements et aux inondations en zones de campagne et zones péri-urbaines. En effet, la terre en surface est particulièrement sèche sur le nord du pays - dure comme du béton dans certaines régions - ce qui la rend quasiment imperméable. Si une partie de l'eau des orages pénètre le sol quand ce dernier est humide, la quasi-totalité ruisselle lorsqu'il est très sec. Logiquement, la quantité d'eau en surface s'en trouve augmentée, accentuant les ruissellements et/ou les inondations.
Un sol sec est quasi-imperméable et favorise le ruissellement de l'eau de pluie - illustration Pixabay