Un été chaud est-il toujours possible cette année ?
vendredi 12 mai 2023
Un printemps instable, quelques jours de fraîcheur et certains s'inquiètent déjà pour l'été à venir. Que disent les projections et les exemples du passé ? Éléments de réponse.
Que disent les statistiques après un printemps humide ?
Avant toute chose, il est important de préciser que ce printemps 2023 n'a rien de frais ! Sur la période du 1er mars au 11 mai 2023, l'écart thermique aux normales 1991-2020 est d'environ +0,6°C en France. Ce sont les printemps très doux à chauds des dernières années qui faussent notre perception de ce que sont les températures printanières normales. En revanche, il faut avouer que ce printemps 2023 se montre plus humide, d'autant qu'il succède à un printemps 2022 remarquablement sec, renforçant le contraste d'une année sur l'autre. La carte ci-dessous montre la domination du courant océanique dépressionnaire sur la période du 1er mars au 10 mai 2023.
Anomalies de géopotentiels en Europe entre le 1er mars et le 10 mai 2023 - via NOAA
Ainsi, le printemps 2023 devrait terminer avec un léger excédent pluviométrique en France, brisant une série de quatre printemps secs qui durait depuis 2019. Nous avons regardé dans le passé ce qu'avaient donné les étés suivant des printemps arrosés (bien plus encore que le printemps 2023). Comme vous pouvez le constater sur le tableau ci-dessous, le dernier printemps arrosé date de 2018 et il avait été suivi par un été excessivement sec et chaud, le 3ème plus chaud en France derrière 2003 et 2022 ! En remontant un peu plus loin, on constate que les étés suivant des printemps humides sont très variables : certains furent chauds, d'autres plus frais ou plus humides.
Anomalies thermiques et pluviométriques estivales en France après des printemps humides - Météo Villes
Ce constat permet de rappeler que la météo ne repose pas sur des statistiques et qu'il n'existe aucun enchaînement logique entre les saisons. Un printemps humide ne permet en rien de déterminer la couleur de l'été suivant. Ce n'est pas parce que le printemps 2023 fut plutôt humide que nous allons avoir un été arrosé. Tout peut arriver pour cet été 2023.
Que disent les modèles saisonniers ?
Concernant l'été 2023, il faut avouer que les modèles saisonniers n'ont que peu évolué au cours des derniers mois. C'est toujours la tendance proposée depuis la fin de l'hiver dernier qui prime à quelques semaines du début de l'été météo. Concernant les températures, une anomalie chaude est envisagée, de l'ordre de +0,5 à +1°C sur le nord de la France mais de +1 à +2°C sur le sud. Selon le modèle américain, l'anomalie chaude la plus nette serait observée en juin tandis que juillet serait le plus chaud selon l'européen. Dans tous les cas, les deux s'accordent sur un trimestre plus chaud que la normale.
Projection de l'anomalie thermique en Europe pour l'été 2023 - via ECMWF
Si les premières projections envisageaient un été sec, celles-ci ont évolué vers un été 2023 instable depuis le début du printemps et les dernières modélisations maintiennent cette tendance. On se dirigerait vers un trimestre juin-juillet-août possiblement assez humide, notamment sur le sud et le centre de la France. En cause, une instabilité orageuse possiblement marquée. Les modèles européen comme américain proposent des projections assez similaires. Notons cependant que la fiabilité des tendances saisonnières est plus limitée sur la pluviométrie que sur la température.
Projection de l'anomalie pluviométrique en Europe pour l'été 2023 - via ECMWF
Les effets du réchauffement climatique
Enfin, on ne peut traiter la saison estivale sans évoquer le réchauffement climatique et ses effets. La courbe ci-dessous montre l'évolution des températures moyennes en France durant les étés (juin-juillet-août) de 1930 à 2022. On constate une nette augmentation des températures estivales depuis les années 1980 et particulièrement depuis le début du XXIème siècle. Ainsi, 3 des 4 étés les plus chauds sont survenus lors des 5 dernières années (2018, 2019 et 2022) et l'été le plus frais du siècle actuel (2007) était un été banal jusqu'aux années 1980... Autrement dit, les chances de vivre un été véritablement frais se réduisent à l'ère où notre climat se réchauffe de façon notable.
Température moyenne en France durant l'été de 1930 à 2022 - graphique infoclimat.fr
Il suffit de se pencher sur les étés des 10 dernières années pour constater que la chaleur a largement dominé les débats. L'été 2022 fut bouillant avec de multiples canicules et des anomalies mensuelles ayant excédé les +2°C durant les trois mois estivaux ! Les étés 2018 et 2019 avaient été également très chauds durant les trois mois. Si juin 2021 fut chaud, le duo juillet-août avait été légèrement plus frais que la normale. Depuis 2015, seul l'été 2021 n'a connu aucun épisode caniculaire. Les chances d'éviter tout épisode caniculaire au cours de l'été sont de plus en plus minces à l'ère du réchauffement climatique...
Anomalies thermiques durant les mois estivaux de 2013 à 2022 - Météo Villes