Année 2022 : la plus chaude et la plus sèche jamais enregistrée pour le moment en France
samedi 15 octobre 2022L'année la plus chaude depuis le début des mesures :
Du 1er janvier au 13 octobre 2022, l'indicateur thermique national moyen (la moyenne de mesures quotidiennes de la température moyenne de l’air dans 30 stations météorologiques réparties de manière équilibrée sur le territoire métropolitain) atteint 15,51°C soit la valeur la plus haute jamais observée sur cette période depuis le début de ce type de mesure (1947).
Évolution de l'indicateur thermique national annuel sur la période du 01/01 au 15/10 depuis 1947 – Via infoclimat.fr
Cette valeur n'est pas vraiment surprenante compte tenu de la récurrence exceptionnelle de périodes de températures situées bien au-dessus des normales depuis le début de l'année. En prenant l'évolution de l'indicateur thermique national quotidien depuis le 1er janvier, on se rend effectivement compte que les températures anormalement élevées ont largement dominé depuis le 1er janvier.
Évolution de l'indicateur thermique national quotidien sur la période du 01/01 au 15/10/2022 – Via infoclimat.fr
La douceur exceptionnelle du tout début d'année, le printemps durablement calme et doux, la canicule exceptionnellement intense et précoce du mois de juin ou encore les canicules successives de juillet et août, tout ces événements ont rendu cette année exceptionnelle en terme d'anomalie thermique.
Anomalie thermique en France le samedi 18 juin 2022 - via tropicaltidbits.com
A l'inverse, les périodes plus fraîches et/ou froides que la normale ont été largement minoritaires, se comptant seulement sur les doigts d'une main. On se souvient par exemple du gel tardif et marqué du début du mois d'avril 2022 qui avait engendré de nombreux dégâts sur les cultures françaises, notamment après plusieurs périodes de douceur précoce.
Braseros dans un vignoble français dans la nuit du 3 au 4 avril 2022 - Mediavenir
Ainsi, si l'année 2022 n'est pas encore terminée, il est clair que celle-ci s'annonce historique. Avec 15,51°C d'indicateur thermique national annuel moyen au 13 octobre, l'année 2022 est en effet situé largement au-dessus de l'année 2020 (15,29°C sur la même période), l'année 2018 (15,14°C) et l'année 2003 (14,97).
Pour rappel, l'année 2020 avait également observé une récurrence exceptionnelle de périodes plus chaudes que la normale avec 11 des 12 mois de l'année présentant des températures moyennes supérieures aux normales, la plupart très largement.
Anomalies mensuelles de températures sur la France durant l'année 2020 – Météo-Villes
On se souvient par exemple de la douceur exceptionnelle du mois de février 2020 avec une absence de neige en montagne, du printemps le plus ensoleillé jamais observé sur notre pays et le deuxième plus chaud, des canicules et vagues de chaleur particulièrement marquées entre juillet et septembre ou encore d'une fin d'année encore anormalement douce.
La Pointe du Surgatte (1805m) totalement exempte de neige dans les Pyrénées avec plus de 17°C le 23 février 2022 - Image Dorian DZIADULA
L'année 2018 avait également présenté des températures bien trop élevées par rapport aux normales de saison. Là encore, un seul mois de l'année avait été plus frais que la normale, à savoir le mois de février 2018. Le reste de l'année, les températures s'étaient montrées bien souvent au-dessus des moyennes et ce sur la quasi-totalité du pays.
Ecart à la moyenne annuelle de référence (1981-2010) de la température moyenne en France durant l'année 2018 – Météo-France
Là encore, les périodes douces et chaudes ont largement dominé sur l'année. On se souvient par exemple que l'été 2018 fut le 2ème plus chaud jamais enregistré en France (après l'été 2003) avec une chaleur persistant globalement du 15 juin au 15 août sur la quasi totalité des régions. Cet été avait d'ailleurs été précédé par un printemps très doux et un automne l'étant tout autant.
Part du territoire concerné par la chaleur et la très forte chaleur durant l'été 2018 – Météo-Villes
Enfin, l'année 2003, qui reste pour beaucoup comme la référence en terme de chaleur se classe maintenant à la 4ème place des années les plus chaudes sur la période du 1er janvier au 13 octobre. Un classement qui peut sembler paradoxal compte tenu de la mémoire collective d'une chaleur exceptionnelle, notamment durant l'été.
La chaleur s'était en effet montrée marquée dès le début du mois de juin, persistant jusqu'à la fin août 2003 avec plusieurs pics caniculaires marqués. C'est notamment durant la première quinzaine d'août que cette chaleur avait atteint un pic, concernant la quasi-totalité du pays avec des valeurs jamais observées auparavant.
Canicule du mois d’août 2003 : Une semaine et demi de canicule historique, à Paris
On relevait par exemple jusqu'à 44,1°C à Conqueyrac (Gard), ancien record absolu de chaleur en France, plus de 40°C sur de nombreuses régions mais également la plus chaude journée jamais enregistrée en France le 5 août.
Retour sur cet été exceptionnel en France >>
Ainsi, malgré ces années présentant des périodes et épisodes hors-normes en terme de chaleur, l'année 2022 est en passe de devenir l'année la plus chaude jamais enregistrée en France si la tendance ne s'inverse pas d'ici la fin décembre.
L'année la plus sèche depuis le début des mesures :
Outre des températures anormalement élevées durant une majorité de l'année, c'est également le manque de précipitation qui marque cette année 2022. En effet, le cumul national moyen atteint 475,1mm au 13 octobre, une valeur là aussi record depuis le début de ce type de mesure (1959) qui explique en partie le nombre de régions encore concernées par la sécheresse en cette mi-octobre.
Arrêtés de sécheresse en France au 15 octobre 2022 – Propluvia
Depuis l'hiver dernier, les périodes anticycloniques dominent en effet largement sur la France avec des anomalies de pression très élevées sur l'Ouest de l'Europe et notamment la France, expliquant ce manque récurrent de temps perturbé et ce cumul moyen particulièrement faible.
Anomalies de géopotentiels à l'échelle du globe du 01/01 au 03/10/2022 – NOAA
Ce cumul moyen est tellement faible qu'il est situé plus de 30mm en-dessous du précédent record de 509,2mm en 1976 (sur la période allant du 01/01 au 13/10).
L'année 1976 fut jusqu'alors l'année de référence en terme de manque de précipitations sur la France avec une sécheresse exceptionnelle engendrant de très nombreuses conséquences à l'échelle du pays. Dès l'hiver 1975/1976 le manque d'eau était présent sur notre pays avec des conditions anticycloniques récurrentes. C'est néanmoins entre le printemps et l'été que cette sécheresse s'était accentuée, notamment en raison d'une chaleur récurrente (mais moins forte que ce que nous avons connu en 2022).
À la fin du mois de juin 1976, le cataclysme de la sécheresse est tel que dans le Médoc, on a retrouvé le vieux rite des Rogations, procession religieuse pour demander l’eau au Ciel !
De nombreuses régions ont en effet fortement souffert du manque d'eau, notamment entre l'Ouest et le Nord de la France (le temps fut paradoxalement plus humide sur le Sud-Est) avec des conséquences désastreuses sur l'agriculture mais également l'économie du pays. On estime à l'époque des pertes commerciales s'élevant à plus de 4 milliards de francs et une perte de croissance de 0,5%. De nombreuses aides humanitaires et commerciales ont également été entreprises par l'armée et le gouvernement durant la période, notamment durant l'été.
Il faudra attendre l'année suivante pour que les sols et les nappes phréatiques retrouvent une situation plus « normale» avec le retour de conditions plus durablement perturbées et une humidité des sols retrouvant des niveaux bien plus acceptables à l'échelle du pays.
Rapport à la normale des précipitations sur la France entre juillet 1975 et juin 1977 – Météo-France
Néanmoins, si l'année 1976 fut l'année de référence en terme de sécheresse, 2011 observait un temps également très sec avec un cumul annuel moyen à l'échelle de la France de seulement 509,5mm au 13 octobre.
Là encore l'année 2011 avait observé des périodes durablement chaudes et anticycloniques avec une sécheresse affectant de nombreuses régions. Si des dégradations orageuses étaient régulièrement observées durant l'été, les précipitations se montraient toutefois bien trop localisées pour enrayer la situation de sécheresse touchant le pays depuis l'hiver précédent, notamment après un hiver très calme et sec.
Une du parisien mettant en avant la situation de sécheresse au mois d'avril 2011 sur le Nord de la France
Ces deux années s'étaient donc déjà montrées exceptionnellement sèches avec un cumul moyen à peine supérieur à 500mm au mois d'octobre à l'échelle de la France. Au 13 octobre 2022, nous n'atteignons même pas les 480mm à l'échelle du pays, ce qui laisse entrevoir à quel point le manque d'eau est important et ce depuis de longs mois.
Le lac du Broc dans les Alpes-Maritimes complètement à sec au début du mois d'octobre 2022 – Photos via France 3 et département des Alpes-Maritimes
Que ce soit au niveau de la chaleur ou de la sécheresse, l'année 2022 se montre donc exceptionnelle jusqu'à présent avec de nouveaux records à la clef. Si l'année ne se terminera que dans plusieurs mois, il conviendrait d'un changement radical de régime pour inverser la tendance et ceci ne semble malheureusement pas d'actualité, ce qui pourrait placer l'année 2022 comme la plus chaude et la plus sèche depuis le début des relevés météorologiques en France.