Coronavirus : météo et pollution comme facteur aggravant ?
mercredi 6 mai 2020De nombreuses études sont en cours sur le coronavirus. Plusieurs d'entre-elles s'intéressent au rôle que pourraient jouer la météo et la pollution, que certaines évoquent comme un facteur aggravant.
La pollution, un facteur aggravant ?
Plusieurs études actuellement en cours semblent démontrer que la pollution aux particules fines est un facteur aggravant des symptômes du coronavirus, une tendance observée dans plusieurs pays.
Nuage de pollution au dessus de la plaine du Pô dans le nord de l'Italie, une scène tristement fréquente
L'image satellite ci-dessus illustre une situation qui se produit plusieurs fois par an lorsqu'un anticyclone s'installe durablement. Dans le nord de l'Italie, la plaine du Pô fait office de gigantesque cuvette dans laquelle s'accumulent les particules fines de pollution lorsque les vents sont faibles.
Ces épisodes récurrents surexposent la population aux particules fines, un véritable problème sanitaire que le covid-19 semble mettre en lumière. En effet, la pollution abîme les muqueuses des voies respiratoires et du poumon, ce qui fait pénétrer plus facilement les particules fines - et donc les virus - au fond des voies aériennes. Un individu vivant dans une région polluée aurait donc plus de chances de contracter le virus.
Concentrations des cas de covid-19 en Italie (à gauche) et taux de pollution au NO2 en février (à droite)
En plus de possiblement favoriser la contamination, nous savons qu'une surexposition à la pollution sur le long terme a des effets néfastes sur la santé (problèmes respiratoires, accentuation des allergies, etc). Dans les régions polluées du nord de l'Italie, le taux de mortalité lié au covid-19 est presque deux fois supérieur au reste du pays. Si la densité de population a d'abord été évoquée pour l'expliquer, des scientifiques ont rapidement avancé l'hypothèse de la pollution de l'air.
Les habitants de ces régions - régulièrement exposés à des épisodes de pollution importants - sont fragilisés de manière chronique au niveau des voies respiratoires, point d'entrée du virus mais aussi zone à laquelle il s'attaque. Par conséquent, il ne semble pas surprenant que le taux de mortalité lié au coronavirus soit plus important dans ces régions.
Si les études actuelles ne fournissent encore que des résultats préliminaires, cette hypothèse est crédible. En 2003, lors de l'épidémie de SRAS, une équipe chinoise avait démontré que les habitants des régions polluées avaient 84% de risques en plus de succomber à la maladie comparé aux habitants des zones non polluées.
Une contamination par l'air pollué ?
Certaines études - partiellement contestées - affirment que le covid-19 pouvait survivre jusqu'à 3 heures à l'air libre. Par conséquent, peut-on envisager que les brumes de pollution jouent un rôle dans la contamination ?
En Chine, le port du masque est largement répandu face aux épisodes récurrents et majeurs de pollution - photo AFP
Des chercheurs ont pulvérisé le covid-19 dans l'air ambiant dans le but d'imiter les projections de salive d'une personne contaminée qui tousse ou qui éternue. Ils ont retrouvé des fines particules viables de coronavirus en suspension dans l'air 3 heures après les avoir pulvérisées. Le coronavirus pourrait donc rester viable et infectieux à l'air libre plusieurs heures. Une étude néanmoins très contestée par une partie de la communauté scientifique puisque d'autres études indiquent que le risque de contamination à l'air libre est quasi-nul.
En considérant l'hypothèse que le virus puisse être contaminant dans l'air que nous respirons, les épisodes de pollution pourraient jouer un rôle dans la propagation de l'épidémie car les nombreuses particules fines en suspension dans l'atmosphère constituent des supports sur lesquels peuvent se fixer les virus avant d'être inhalés par la simple respiration.
Illustration de la brume de pollution sur Grenoble - photo ledahu.net
Cela pourrait en partie expliquer pourquoi le nord de l'Italie - fortement pollué cet hiver et au début du printemps en lien avec un anticyclone durable ne renouvelant que très peu l'air - a vu l'épidémie prendre une ampleur bien plus importante que dans le reste du pays, au delà du fait que ses habitants sont fragilisés chroniquement. Grenoble - très habituée aux épisodes de pollution - a été relativement peu touchée par ces derniers cet hiver et affiche un taux de contamination assez faible. Pourrait-il y avoir un lien ?...
Bien évidemment, ces réflexions sur le caractère potentiellement contaminant des brumes de pollution ne sont que de simples hypothèses. Rappelons aussi qu'il est normal que les zones les plus peuplées soient les plus contaminées. Bien souvent, densité de population élevée rime avec pollution. Tout est lié, ou presque...
Nous remercions Jean-Jacques Thillet - ingénieur météo à la retraite - dont les réflexions et hypothèses nous ont inspiré la rédaction de cet article.