Les prévisions à court terme sont-elles paradoxalement plus difficiles qu'à long terme ?
mardi 31 juillet 2012La France est un pays au climat contrasté avec de multiples influences (océanique, continentale et méditerranéenne). Dans ce contexte, le degré de précision des prévisions météo peut varier d'une région à l'autre en fonction de la situation météo et de son évolution.
Si dans le Sud-est, le degré de précision météo à court, moyen et long terme est bon en été (le climat méditerranéen est généralement stable, à l'écart des perturbations océaniques ou des orages localisés comme en zone de montagne), il peut-être moins "sûr" ailleurs.
Image satellitale mardi après-midi
|
On voit très bien la limite nuageuse : elle sépare de manière très nette les régions du nord de la Loire à celles du sud sous le soleil. Une erreur de prévision de 50 km et le rendu météo peut changer du tout au tout ! |
Depuis le début de l'été, la France se trouve donc en limite de deux influences : les remontées d'air très chaud venues d'Afrique du Nord et l'influence océanique plus humide et plus fraîche. Paris, Metz ou Nantes sont par exemple des villes situées entre les deux, d'où des surprises.
L'exemple du 14 juillet illustre ces "surprises" : les averses étaient alors très fréquentes, mais certaines régions sont passées au travers). Dans le cas où une zone de précipitations n'est pas compacte, il est impossible de prévoir la localisation et le timing d'une averse à plus d'une heure d'échéance car ce phénomène est trop petit et sa formation est trop aléatoire à l'échelle d'un modèle météo. Nous communiquons donc sur le risque, ce qui n'est pas forcément évident à comprendre. Lorsque nous annonçons 10% de risque de pluie, ceci ne veut pas dire que nous sommes certain qu'il n'y aura pas de pluie. De même, un risque de 70% suppose qu'il y a 30% de chance que nous passions au travers.
Localisation des pluies et des averses le 14 juillet
Il suffit en effet que les cartes de prévisions (ou les météorologistes) se trompent de 50 km (une très petite distance sur l'échelle de la météo) pour que cela fasse toute la différence. Et une prévision météo qui n'est pas précise à court terme dans le temps et l'espace ne sert à rien !
Mais si une prévision à court terme est fausse, cela ne veut pas forcément dire que la prévision à plus long terme est impossible. Il est d'ailleurs presque plus difficile de réaliser une prévision à très court terme car elle nécessite un degré de précision bien supérieur.
Les prévisions à moyen et court terme peuvent être plus fiables qu'à long terme, en témoigne la période de temps estival généralisé à l'ensemble de la France de la semaine dernière qui avait été parfaitement prévue une semaine avant avec un degré de fiabilité excellent ! (5/5)
Dans la prévision à moyen et long terme, les modèles météo simulent l'évolution de l'atmosphère sur de très grandes zones ; ils donnent la pression, l’emplacement des anticyclones, des dépressions et des perturbations, la force et la direction des vents, les descentes d’air froid ici qui provoquent mécaniquement des remontées d’air chaud ailleurs...
Carte de prévision issue du modèle météo BRAKNELL pour samedi prochain
|
Les "L" correspondent aux dépressions, les "H" aux anticyclones. Pas d'anticyclone prévu sur la France avec la proximité d'une dépression britannique et une forte instabilité au Nord. Temps plus variable ailleurs avec des orages à proximité de la dépression espagnole (Sud-ouest) ainsi que près des Alpes (présence d'une perturbation figurée avec des ronds et des triangles). |
Maintenant, imaginons que 5 jours avant d'organiser une sortie, vous vous renseignez sur les prévisions météo pour votre ville ; les modèles météo voient un anticyclone sur la France et une dépression 500 km plus au nord (sur les Îles Britanniques par exemple, un cas très courant). La météo annonce donc du beau temps. Plus les jours passent, plus les prévisions s’affinent et la dépression est placée un peu plus au sud…Il faut bien comprendre qu’à l’échelle de la planète, une erreur de 300 ou 400 km : ce n'est RIEN DU TOUT. Sauf que, ce jour là ; vous maudirez la météo parce qu'elle avait encore prévu 5 jours avant le grand beau temps.
Voilà donc de quoi relativiser à la fois une confiance trop aveugle dans les prévisions à moyen et long terme (au-delà de 3 jours), tout comme un scepticisme éxagéré concernant les prévsions du temps à court terme (entre 1 et 2 jours).
Dernier cas qui nous intéresse, il s'agit des prévisions saisonnières.
Peut-on prévoir le temps à plusieurs mois d’échéance ?
Il est vrai qu’on peut se poser la question dans la mesure où une prévision pour le lendemain est parfois assez aléatoire… En fait, une tendance saisonnière ne présente pas le même niveau de précision qu’une prévision à court terme (même si comme on vient de le voir, la prévision à court terme peut parfois être erronée). La tendance pour les prochains mois ne peut pas être DETAILLEE et dans l’état actuel de nos connaissances, nous sommes seulement plus ou moins capables d’indiquer si un mois sera plus chaud, plus froid, plus sec ou plus humide que la normale. Il est par exemple impossible de savoir précisément quel temps il fera le 9 octobre 2012 alors que nous sommes en août. Il est également impossible de prévoir les vagues de chaleur de courte durée (qui peuvent se produire, y compris lors d’un mois dit "plus doux que la normale”). Cet élément est vraiment à prendre en compte.
|
Carte de prévision mensuelle des anomalies de températures sur l'Europe
|
Carte de prévision mensuelle des anomalies de précipitations sur l'Europe
Comment fait-on pour établir des tendances saisonnières ?
A partir du temps qu’il a fait sur l’ensemble de la planète (car tout est lié, sur terre) au cours de ces derniers mois, des modèles mathématiques sont désormais capables de simuler les anomalies de températures et de précipitations pour les mois à venir sur la terre entière. Ces prévisions (ou plutôt ces tendances) doivent être régulièrement réactualisées en fonction des évolutions car de petites imprécisions sur telles ou telles régions se transforment rapidement en des erreurs énormes à l’échelle d’un continent. De grosses surprises ne sont donc pas exclues… Des progrès ont été réalisés au cours de ces dernières années mais il reste beaucoup de chemin à parcourir !
Guillaume Séchet pour Meteo-villes