Sécheresse durable au nord : trois semaines et demie sans pluie !
jeudi 8 juin 2023
La pluie n'est plus tombée depuis la mi-mai sur une grande partie de la moitié nord ! De plus, soleil généreux et vent de nord-est accentuent l'assèchement des sols.
Un blocage anticyclonique durable
Depuis la mi-mai 2023, la moitié nord de la France est sous l'influence d'un blocage anticyclonique. Cette vaste cellule de hautes pressions fait du sur-place du nord de l'Atlantique à la Mer Baltique. Sur la période allant du 15 mai au 5 juin 2023, l’anomalie de la pression atmosphérique grimpe jusqu’à +15 hPa à l’ouest des Îles Britanniques, une anomalie remarquable qui témoigne de la puissance de ce blocage ! Ainsi, les orages doivent se contenter de la moitié sud de la France et les régions du nord sont concernées par un temps durablement sec et ensoleillé sous le flux de nord-est.
Anomalie de la pression atmosphérique en Europe du 15 mai au 5 juin 2023 - carte NOAA
Une bonne partie de la moitié nord n'a plus vu la pluie tomber depuis près de trois semaines et demie ! En effet, les dernières précipitations remontent bien souvent au lundi 15 mai 2023. De nombreuses stations sont donc sur une série de 23 jours consécutifs sans pluie entre le 15 mai et le 7 juin. À Alençon, Saint-Quentin ou encore Charleville-Mézières, les dernières pluies remontent même au samedi 13 mai (25 jours sans pluie au 7 juin) ! Dans certains secteurs, ces séries arrivent aux niveaux records pour cette époque de l'année ! En effet, la fin du printemps et le début de l'été sont souvent propices à des déclenchements orageux et les séquences sèches aussi durables y sont rares.
Nombre de jours consécutifs sans pluie sur la moitié nord de la France au 7 juin 2023 – Météo Villes
Retour éclair de la sécheresse en surface
Depuis la mi-mai 2023, toutes les conditions sont réunies pour le retour de la sécheresse superficielle sur la moitié nord de la France. Outre l'absence totale de pluie, le blocage anticyclonique favorise une succession de journées pleinement ensoleillées. À Paris, on totalise 282 heures d'ensoleillement en 22 jours seulement entre le 16 mai et le 7 juin 2023 ! À titre de comparaison, un mois de juillet normal compte 222 heures de soleil à Paris. L'excédent d'ensoleillement est donc remarquable et s'applique sur toute la moitié nord de l'hexagone !
Ensoleillement quotidien à Paris entre 1er mai au 7 juin 2023 - graphique infoclimat.fr
En plus de l'absence de pluie et d'un ensoleillement exceptionnel, il faut ajouter un vent de nord-est particulièrement sec qui souffle depuis plus de trois semaines. Cette combinaison entraîne une évapo-transpiration qui atteint des niveaux records sur la moitié nord, comme le montre cette courbe valable pour Nancy. Entre une absence de pluie, un soleil très généreux et un vent très sec, les sols se dessèchent à une vitesse record. Ainsi, nous avons perdu la quasi-totalité du bénéfice du printemps humide...
Indice d'évapo-transpiration quotidien à Nancy depuis le 1er janvier 2023 - graphique Météo France via François Jobard
Par conséquent, la moitié nord de la France fait face à une "sécheresse-éclair", c'est à dire une sécheresse qui s'est développée à une vitesse particulièrement rapide. Alors que les sols étaient plus humides que la normale à la mi-mai, ils sont désormais nettement trop secs sur une grande partie de la moitié nord en date du jeudi 8 juin 2023. C'est entre le centre et le nord-est de la France que la situation est la plus délicate. Précisons qu'on parle ici de sécheresse de surface ou "sécheresse agricole", c'est à dire que les sols ne contiennent que très peu d'eau en surface.
Indice d'humidité des sols en surface au jeudi 8 juin 2023 - carte windy.com
Les nappes toujours trop basses
La séquence orageuse qui concerne la moitié sud depuis maintenant plus de 15 jours ne profite que peu aux nappes phréatiques. En effet, nous sommes à une saison où la végétation est développée et a d'importants besoins en eau. Par conséquent, les végétaux puisent une grande partie de l'eau de pluie, qui ne peut pas s'infiltrer en quantités suffisantes jusqu'aux nappes phréatiques. De plus, les pluies orageuses sont peu bénéfiques car trop intenses et brutales, engendrant un important ruissellement et donc une mauvaise infiltration de l'eau dans le sol. Ainsi, 70% des nappes phréatiques de France restaient déficitaires en date du 4 juin 2023.
Estimation de la part des nappes phréatiques en déficit en France - graphique FranceInfo
Près de 70% des nappes phréatiques françaises affichent toujours des niveaux déficitaires en ce début de mois de juin. Celles-ci apparaissent en jaune (niveau modérément bas), en orange (niveau bas) ou en rouge (niveau très bas) sur la carte ci-dessous. On note toutefois de fortes disparités régionales avec une situation bien meilleure entre la Bretagne et la Vendée ainsi qu'en Moselle. Il est important de préciser que les nappes sont plus ou moins réactives. Si certaines peuvent se remplir rapidement, d'autres mettent de longues semaines ou mois avant de réagir aux pluies.
Niveau des nappes phréatiques par rapport à la normale au 6 juin 2023 - via Info Sécheresse